Un suivi régulier des effluents et du milieu aquatique

L'observatoire, mis en place depuis la mise en service du nouvel hôpital CHALen 2012, assure un suivi :
-des effluents : eaux usées issues de l'hôpital et du bassin urbain en entrée et en sortie de la station d'épuration
-et du milieu aquatique : eaux de surface de l'Arve en amont et en aval de la station d'épuration.

Les campagnes de mesures répondent aux objectifs de caractérisation des effluents, d'analyse de leur traitabilité, et d'évaluation de leur impact sur la qualité des milieux aquatiques et des risques potentiels pour la santé. La comparaison des effluents hospitaliers et des effluents urbains est au cœur du dispositif.

Le protocole de suivi des effluents (sites, fréquences et méthodes de prélèvements, échantillonnage et paramètres suivis) a été établi par l'ensemble des partenaires de SIPIBEL, en appui sur le consortium scientifique, suite à un travail préalable intégrant les études et recherches nationales et étrangères. Il a débuté en février 2011 pour caractériser l'état zéro avant la mise en service du CHAL, et maintenu début 2012 pour l’observation après le démarrage de l’hôpital. Il comporte des analyses physico-chimiques classiques (pH, DCO, DBO, MES,...), des analyses de micropolluants spécifiques (médicaments, détergents, désinfectants, ...) et des paramètres d'analyse d'impact toxique (bioessais, suivis biologiques, tests écotoxicologiques, ...). Ce suivi est réalisé sur la filière eau et sur les boues d'épuration.

L'analyse de polluants à l'état de traces, c'est à dire dans des concentrations de l'ordre du microgramme ou du nanogramme par litre, nécessite de nombreuses précautions lors des opérations de prélèvement et d'échantillonnage pour éviter toute contamination.

Le protocole adopté (nettoyage des flacons, matériaux utilisés…) tend à éviter toute contamination accidentelle des échantillons. De plus, les prélèvements sont effectués sur une durée de 24h en vue de la reconstitution d'un échantillon représentatif en fonction du débit. Enfin, des tests de « blancs de prélèvement » sont effectués afin de contrôler régulièrement la fiabilité du protocole. Celui-ci reste évolutif en fonction des premières observations et de l'évolution des connaissances – très rapide – dans ce domaine. Les recherches menées en appui sur l'observatoire permettent d'élaborer de nouveaux protocoles d'analyse répondant aux besoins de l'observatoire lui-même.

Enfin, étant donné le coût des analyses spécifiques, le protocole retenu résulte également d'un compromis technico-économique, discuté entre les scientifiques, les gestionnaires et les partenaires. Ce protocole est déjà partagé avec d'autres collectivités souhaitant mettre en place des suivis spécifiques.

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Les sites de prélèvement

Dès 2012, dans le cadre de l'observatoire SIPIBEL

- les effluents urbains et les effluents hospitaliers de la STEP de Bellecombe, gérés en parallèle sur deux files distinctes, font l'objet d'analyses mensuelles en entrée -Eaux brutes- et en sortie de station d'épuration -Eaux traitées- ainsi que sur les boues activées des bassins d’aération.

- 3 sites sur l'Arve : à raison de 3 campagnes par an, coordonnées avec les campagnes sur les sites de prélèvement IRMISE (voir ci-après) : un site en amont, un site à l'aval immédiat des rejets de la station d'épuration (Arve aval 1) et un site plus éloigné (Arve aval 2)

 
  Sites de prélèvement de l'Observatoire SIPIBEL entre février 2012 et septembre 2014

 

Depuis 2013 et le projet interreg IRMISE Arve aval

13 sites de prélèvement supplémentaires ont été suivis, étendant le territoire d’étude à l’ensemble du bassin versant franco-suisse de l’Arve aval, jusqu’à la ressource en eau potable (station de réalimentation de Vessy et nappe du Genevois) :

- les effluents traités des STEP d’Ocybèle (France) et Villette (Suisse),

- 2 sites supplémentaires sur l’Arve : situés en aval des 3 points suivis dans SIPIBEL (sites n°4 et 5),

- 2 sites sur le Rhône : un premier à la sortie du lac Léman (n°6) et un second situé à l’aval de la confluence Arve-Rhône (n°7),

- 3 sites au niveau de la station de réalimentation de Vessy et 5 sites sur la nappe du Genevois.

 

   
  Sites de prélèvement de l'Observatoire SIPIBEL-IRMISE
(cliquer sur l'image pour la visualiser en grand)
 

Consulter le site internet d'IRMISE

 

En 2014, changement de configuration de la STEP

Suite à l'accord de la Direction départementale des territoires de Haute-Savoie (DDT 74), la configuration de la station d’épuration de Bellecombe a été modifiée pour tester, en conditions réelles, l’impact d’un mélange des effluents hospitaliers et urbains sur le procédé de traitement et sur la qualité de l’eau rejetée au milieu.

Après prétraitement, une partie de l’effluent urbain était injectée dans l’effluent hospitalier pour obtenir un « effluent mixte » aux proportions souhaitées: 1/3 d’effluent hospitalier et 2/3 d’effluent urbain.

Les premiers tests d'injection ont eu lieu le 13 octobre 2014 et des campagnes de mesures mensuelles ont été menées dans cette nouvelle configuration à partir de décembre 2014.

L'objectif de cette expérimentation qui s'est déroulée jusqu'à avril 2016 était de consolider les éléments mis en évidence par les premiers résultats de l'observatoire (toxicité des effluents...) et d'évaluer la pertinence de la séparation du traitement des effluents hospitaliers et urbains à la STEP de Bellecombe.

 
  Sites de prélèvement de l'Observatoire SIPIBEL entre septembre 2014 et avril 2016

 

Octobre 2015, mise en place du suivi régulier des boues

Le suivi des boues en sortie de filtre presse et en sortie de serre de séchage (boues destinées à l’épandage sur terres agricoles) permet :

  • de compléter « le bilan matière » de la station : en étudiant le transfert des résidus de médicaments, de détergents et de biocides au sein des boues ;
  • de compléter l’évaluation des impacts des effluents hospitaliers, résidus de médicaments, détergents et bactéries antibiorésistantes sur le milieu, à travers le suivi de paramètres physico-chimiques et d’une batterie d’indicateurs biologiques ;
  • d’émettre des préconisations en termes de traitement et gestion de ces boues.
   
  Serre de séchage des boues de la STEP de Bellecombe  

 

Mai 2016, mélange des effluents urbains et hospitaliers

Depuis mai 2016 et suite à la modification de l’arrêté préfectoral, les effluents hospitaliers et urbains sont désormais mélangés et traités au sein d’une station unique. Cette modification a abouti à des changements de sites de prélèvements.

   
  Sites de prélèvement de l'Observatoire SIPIBEL depuis mai 2016  

 

Cette nouvelle configuration permet :

  • de maintenir la caractérisation distincte de l’effluent hospitalier en entrée de STEP, comme c’est le cas depuis l’ouverture du CHAL en février 2012 ;
  • d’étudier les conséquences du mélange des effluents dans ces nouvelles proportions , sur le procédé de traitement et la qualité de l’effluent rejeté au milieu.


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Les paramètres suivis

Les analyses de l’observatoire portent sur les paramètres classiques, des paramètres spécifiques aux activités de soin et sur des indicateurs permettant d'évaluer à terme les risques pour l'environnement et pour la santé.

Au total, plus de 130 paramètres sont suivis sur SIPIBEL. Ils comportent :

- des indicateurs de qualité globale classiques (DCO, DBO, MES, COT …),

- une centaine de micropolluants 

-médicaments : 12 molécules sélectionnées en fonction de leur consommation, de leur risque potentiel pour l’environnement et la santé (bioaccumulation, effets toxiques mis en évidence) et des possibilités analytiques des laboratoires
-détergents
-alkylphénols
-Composés Organiques Volatils (COV)
-halogènes organiques adsorbables (AOX)
-métaux dont le gadolinium utilisé en milieu médical, etc.
- des paramètres microbiologiques : les Intégrons de Multirésistance (IMs), qui permettent d’évaluer la présence des bactéries multirésistantes aux antibiotiques et les Pseudomonas aeruginosa, pathogènes opportunistes

- des paramètres biologiques :

-bioessais sur micro-crustacés et micro-algues,
-essais de génotoxicité : SOS Chromotest et essai des Comètes,
-mesure du potentiel de perturbation endocrinienne,
-indices biologiques de la qualité de la rivière : Indice Biologique Globalisé Normal (IBGN), Indice Biologique Diatomées (IBD)

Sur les sites de prélèvement IRMISE, seuls les paramètres physico-chimiques et microbiologiques sont suivis.

Le plan d’échantillonnage et le détail des paramètres suivis sont présentés dans le rapport SIPIBEL 2011-2015.

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Les campagnes d'analyses

Quelques grands chiffres de l'Observatoire SIPIBEL-IRMISE

   
  Nombre de campagnes, nombre d'échantillons et de "résultats" générés entre février 2011 et décembre 2015  

 

L’Observatoire SIPIBEL a été mis en place dès la mise en service du nouvel hôpital CHAL en février 2012. Les premières campagnes sur le territoire d’IRMISE ont débuté en 2013. Entre février 2012 et mars 2015, soit trois années d’observation,  40 campagnes de mesures ont été effectuées dont 9 campagnes sur l’ensemble du territoire d'IRMISE et 3 campagnes de 7 jours consécutifs en entrée de la station d’épuration de Bellecombe.

Ces campagnes représentent environ 350 échantillons prélevés et analysés, sans compter les blancs de prélèvement (environ 60 échantillons).

Plus de 40 000 données ont déjà été récoltées et compilées dans la base de données DoMinEau.

L'interprétation des données obtenues nécessitent un travail important de validation et d’exploitation fine, en cours de réalisation par les équipes de recherche de SIPIBEL.

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Les études adossées à SIPIBEL

Différentes études sont également menées dans le cadre de l’observatoire, et notamment :

1-Etude des rejets de substances médicamenteuses et détergents/biocides sur le bassin de collecte de la station d'épuration de Bellecombe

Cette étude, menée en 2013, a constitué un préalable à d’autres volets d’études et de recherche de SIPIBEL et IRMISE, en particulier la modélisation des flux de micropolluants et l’étude stratégique IRMISE, présentée ci-après.
Elle a permis :
-de fournir des éléments nécessaires à l'estimation de la consommation en médicaments sur le bassin versant de la STEP de Bellecombe, ainsi que sur l'utilisation de produits détergents et désinfectants spécifiques aux établissements de soin,
-d'apporter des éléments pour estimer les rejets de ces substances dans les réseaux d'eaux usées : rejets  domestiques et non domestiques par temps de pluie, dans le milieu naturel, pour les sources de rejet non raccordées.
-d’amorcer un état des lieux des pratiques et des leviers d'action sur le territoire.

 

2-Etude de la qualité microbiologique de l’air à la station d’épuration de Bellecombe - 2013

Cette étude, menée en 2013, a permis de mesurer, sur une première campagne de mesure, la présence de différents microorganismes (bactéries, champignons) et endotoxines dans l’air,  en différents points de la station d’épuration de Bellecombe, tant sur la file hospitalière qu’urbaine.
Les résultats de cette première campagne montrent des niveaux d’exposition comparables aux autres stations d’épuration déjà étudiées, avec une exposition plus forte dans les espaces clos. Ils demandent à être confirmés et précisés par d’autres campagnes plus ciblées.

Pour en savoir plus, consulter le rapport SIPIBEL 2011-2015.

 

3-Etude stratégique du projet IRMISE

L’étude stratégique IRMISE porte sur la problématique et la stratégie transfrontalières de maîtrise des flux de micropolluants liés à la santé et sur la préservation de la ressource en eau sur le bassin versant de l’Arve aval.
Elle permet de mettre en perspective les autres actions du projet IRMISE (observatoire et modélisation des flux) et doit aboutir à l'élaboration de scénarios de gestion de l’eau et des flux de micropolluants (en particulier les résidus de médicaments et les détergents et désinfectants liés aux activités de santé).

Cette étude vient en réponse aux interrogations liées à la définition des enjeux du projet sur le long terme. Elle apporte une vision stratégique sur le contexte transfrontalier, la problématique des micropolluants et les enjeux de société associés, sur les contraintes technico-économiques et les pressions à venir (démographiques notamment).
Elle fait le lien entre les acteurs de la gestion de différentes parties du cycle de l’eau (assainissement, milieux aquatiques, eau potable), les acteurs de la santé et les citoyens.

Portée par le Syndicat Mixte d’Aménagement de l’Arve et de ses Affluents (SM3A-maître d’ouvrage) et l’Etat de Genève (co-financeur), elle s’intègre pleinement dans le Schéma d’Aménagement de Gestion des Eaux (SAGE) de l’Arve.

 

L’étude s'est déroulée en deux temps et trois phases :
- Un premier temps d'analyse de la situation et de réflexion prospective sur les évolutions du territoire et les enjeux et un second temps d'intégration des résultats de l'observatoire et des modélisations.
- Elle comporte trois phases :
Phase 1 « Connaissance du territoire et formalisation des enjeux » : il s’agit d’une analyse des politiques publiques et des informations techniques (pollutions et moyens techniques de maîtrise). Lire le rapport (81p.) et la synthèse (8p.)
Phase 2 « Enquête de perception des acteurs de l'eau, de la santé et des citoyens », lire le rapport (64p.)
Phase 3 « Scénarios de gestion de l’eau », avec une première analyse technico-économique, lire le rapport (77p.)

Cette étude s'est achevée en mars 2015, avec une présentation des résultats lors de la conférence Eau & Santé organisée par le Graie et l'ASTEE, lire la synthèse (6p.)

 

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Les résultats : conclusions et enseignements

L’observatoire SIPIBEL a permis un suivi fin et novateur des effluents urbains et hospitaliers de la STEP de Bellecombe et de leurs impacts sur le milieu, à travers 40 campagnes de prélèvements menées entre février 2011 et décembre 2015 et plus de 130 paramètres mesurés.

Les résultats et les conclusions issus de cet Observatoire sont consultables dans le rapport 2011-2015 sur les résultats du site pilote de Bellecombe et dans la synthèse 2011-2015.

 

Les principaux résultats du suivi

  • L’effluent hospitalier présente certaines spécificités différentes d'un effluent urbain,
  • La majorité du flux de résidus de médicaments et de détergents provient des apports diffus,
  • Le traitement de la STEP est efficace... mais n’élimine pas tous les polluants,
  • Les boues des bassins d’aération de la filière hôpital ont tendance à s’enrichir en gènes de résistance,
  • Traiter séparément l’effluent hospitalier n’est pas la solution appropriée,
  • Les effluents hospitaliers méritent une attention particulière,
  • Des traces de résidus de médicaments sont retrouvées dans l’Arve et dans la nappe du Genevois.

 

 

 

 
Moyennes des abattements et flux de médicaments en sortie des filières urbaine et hôpital
(février 2012 à octobre 2014 ; 20 campagnes)
 

 

Des avancées sur différents axes de connaissances

  • La modélisation des flux de résidus de médicaments,
  • La compréhension du devenir des micropolluants au sein des boues d’épuration,
  • La caractérisation des dangers écotoxiques et écologiques,
  • L’efficacité des traitements complémentaires par ozonation,
  • Les potentialités de réduction à la source des rejets de médicaments dans l’eau.
Comparaison des mesures et du modèle des flux de diclofénac
entrant en STEP pour la filière hôpital
Dispositif mis en place pour le projet Persist'Env

 

Les conclusions, les enseignements et les perspectives

Le suivi physico-chimique des effluents et de leurs impacts biologiques et toxicologiques entre 2011 et 2016 ont conduit le Syndicat intercommunal des eaux des Rocailles et de Bellecombe, appuyé par le consortium scientifique, à solliciter une modification de l’arrêté préfectoral afin de revenir à une situation classique de traitement des effluents hospitalier et urbain au sein d’une filière unique.

La réalisation de campagnes de mesure en routine a permis de valider certains paramètres en tant qu’indicateurs (ex : 12 des 15 molécules de la liste des médicaments suivis, les intégrons de résistance, la batterie de bioessais sur organismes) et la non - pertinence d’autres paramètres, qui ont été retirés de la liste (ex : test d’Ames).

L’association « analyses chimiques et biologiques » est apparu comme un enrichissement considérable pour l’appréciation des risques.

Les résultats obtenus confirment tout l’intérêt d’un observatoire, qui rend possible l’étude de la variabilité (en termes de concentrations, flux, toxicité, etc.) et des évolutions relatives à la nature des effluents, au système d’assainissement et à l’impact des effluents sur le milieu, grâce à un suivi sur plusieurs années.

Enfin, cet observatoire est une base solide de connaissances et de partenariats pour plusieurs projets d'études et de recherche permettant une valorisation importante des résultats.

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