En France, depuis 150 ans, le système traditionnel de gestion des eaux pluviales consiste à les évacuer le plus rapidement possible de la ville en utilisant un gigantesque système de tuyaux qui, très souvent, recueille également les eaux usées.
Ce mode de gestion est extrêmement couteux en infrastructures. De plus il occasionne des dysfonctionnements multiples : débordements des réseaux occasionnant des inondations dans les centres-villes ; rejets d’effluents pollués dans les milieux naturels.
Il transforme une ressource précieuse, l’eau de pluie, en un déchet et en une menace pour la population.
Depuis une quarantaine d’années, de nombreuses villes découvrent (ou redécouvrent) des solutions différentes, dites « alternatives » qui reposent sur un tout autre principe.
Il s’agit essentiellement de rendre la ville « transparente pour l’eau », c’est-à-dire de faire en sorte que le processus d’urbanisation perturbe le moins possible, et idéalement pas du tout, le cycle hydrologique. De très nombreuses solutions ont été développées et mises en œuvre. Elles reposent sur trois principes essentiels ; infiltrer l’eau dans le sol, la stocker, ralentir au maximum son évacuation.
Le principal objectif est d’éviter de concentrer les flux d’eau et de polluants. Ces solutions permettent également de valoriser les eaux pluviales urbaines, que ce soit pour des usages traditionnels ne nécessitant pas d’eau potable (arrosage par exemple) ou pour des usages nouveaux (lutte contre les ilots de chaleur urbains).
Ces solutions sont possibles car les eaux pluviales sont très peu polluées dès lors qu’on les récupère au plus près de l’endroit où elles touchent le sol. C’est au cours de leur transfert, en ruisselant sur les surfaces urbaines, puis dans les systèmes traditionnels d’assainissement, qu’elles se chargent en polluants et deviennent un danger pour l’environnement.
Malgré les freins au changement qui subsistent, le développement de ces nouvelles solutions est indispensable et bien engagé. Leur mise en œuvre est d’ailleurs devenue la règle dans de nombreuses collectivités, petites ou grandes, qui ont été pionnières dans ce domaine.
A partir du milieu du XIXème siècle, les villes des pays développés ont mis en pratique un principe unique pour gérer la totalité des eaux produites par la ville. Ce principe consiste à évacuer toutes les eaux le plus rapidement possible de la ville. Il s’applique aussi bien aux eaux usées (c’est-à-dire celles qui ont été utilisées) qu’aux eaux pluviales (c’est-à-dire celles issues du ruissellement de l’eau de pluie sur les surfaces urbaines). Sur le plan technique, ce principe repose sur de gigantesques systèmes d’assainissement, principalement constitués de réseaux qui se développent sous le sol des villes. Ces réseaux convergent vers une ou plusieurs stations d’épuration chargées de nettoyer l’eau avant son rejet au milieu naturel à l’aval de la ville.
Pendant les périodes sèches seules les eaux usées circulent dans le système d’assainissement. Pendant les périodes pluvieuses, il faut évacuer à la fois les eaux pluviales et les eaux usées. Si les débits d’eau usée sont relativement constants, les débits d’eau pluviale sont extrêmement variables et peuvent, pendant les pluies les plus violentes, atteindre des valeurs qui sont plusieurs centaines de fois supérieures aux débits maximum d’eaux usées.
En théorie, il existe deux grandes familles de systèmes d’assainissement :
En réalité, il existe très peu de systèmes réellement séparatifs et la plupart des réseaux, même censés être des réseaux d’eaux usées, voient leur débit augmenter de façon très significative pendant les périodes de pluie et doivent être munis de déversoirs d’orage pour éviter les débordements sur la chaussée.
Les rejets urbains de temps de pluie sont donc constitués de quatre types de rejets distincts :
Les systèmes d’assainissement des villes occidentales sont gigantesques. Des centaines, souvent des milliers de kilomètres de tuyaux s’étendent sous les rues, plusieurs mètres sous la surface. Les dimensions des tuyaux sont impressionnantes. Dans les grandes villes, les canalisations les plus grandes ont souvent plusieurs mètres de hauteur et de largeur. En temps de pluie ce sont de véritables torrents d’eau sale qui coulent juste sous nos pieds avec des débits de plusieurs dizaines de mètres cubes par seconde. La valeur patrimoniale de ces dispositifs est également très grande et se chiffre souvent en milliards d’euros. Avec les montants actuels de dépenses consacrées aux investissements en assainissement, il faudrait probablement plus d’un siècle pour reconstruire à l’identique les systèmes existants.
La particularité de ce patrimoine est qu’il est totalement méconnu. Invisible, difficilement accessible pour les non-professionnels, associé à une image très négative du fait des flux qu’il véhicule, il est le plus souvent ignoré aussi bien des citoyens que de leurs élus.
Ces systèmes d’assainissement se sont constitués progressivement au cours des 180 années passées, au fur et à mesure de l’amélioration de l’hygiène et des conditions de vie urbaine dans un premier temps, puis de l’extension des villes dans un second temps. Une partie de ces réseaux est donc ancienne et beaucoup de canalisations commencent à se dégrader.
Même si des dysfonctionnements se produisent parfois (débordements de réseaux, mauvaises odeurs, rejets de polluants au milieu naturel), ces systèmes rendent globalement un service jugé satisfaisant par les citadins.
Dans beaucoup de villes des pays en développement la situation est très différente. Souvent seule une petite partie des villes est équipée d’un réseau de collecte des eaux usées, qui n’aboutit d’ailleurs que très rarement à une station d’épuration opérationnelle. Dans la plupart des quartiers la solution la plus fréquente est constituée par des installations individuelles très sommaires : une simple fosse, souvent non étanche, directement connectée aux toilettes (qui reçoit ce que l’on appelle les « eaux noires »). Les « eaux grises » (cuisine, vaisselle, lavage du corps ou de la lessive) sont le plus souvent évacuées directement dans la rue. Les eaux de ruissellement sont recueillies dans des caniveaux et rejoignent les ruisseaux ou des thalwegs naturels, parfois des canaux artificiels, où elles se mélangent aux eaux grises. L’absence de service organisé de collecte des ordures a également pour conséquence l’accumulation des détritus dans ces canaux naturels ou artificiels. En cas de pluie violente les débordements sont fréquents, l’eau polluée vient alors inonder les maisons et contaminer les puits utilisés pour la production d’eau.
Dans l’état actuel des choses, il semble très difficile financièrement de développer rapidement dans ces villes en pleine explosion démographique des systèmes d’assainissement identiques à ceux qui ont mis un siècle et demi à se mettre en place en Europe.
[1] En outre les procédés de traitement mis en œuvre dans les stations d’épuration (presque toujours de type biologiques) supportent difficilement les variations importantes de débit et de composition des apports dues au mélange des eaux usées avec des eaux pluviales.
Les pluies, et donc les débits qu’elles génèrent, sont des phénomènes que l’on considère généralement comme « non bornés ». De façon pragmatique, ceci signifie que le déluge est possible et qu’il n’est pas possible de construire des ouvrages hydrauliques suffisamment grands pour fonctionner « normalement » quelles que soient les conditions.
durée (min) | hauteur (mm) | lieu | date |
---|---|---|---|
1 | 38 | Barot (Guadeloupe) | 26/11/1970 |
8 | 126 | Fussen (Bavière) | 25/5/1920 |
15 | 198 | Plumb Point (Jamaica) | 12/05/1916 |
20 | 206 | Curtea (Roumanie) | 7/07/1947 |
42 | 305 | Holt (Montana) | 22/06/1947 |
130 | 483 | Rockport (Virginia) | 18/07/1889 |
165 | 559 | D’Hannis (Texas) | 01/07/1935 |
270 | 782 | Smethport (Pensylvania) | 16/09/1942 |
540 | 1 087 | Bélouve (La Réunion) | 28/02/1964 |
720 | 1 340 | Bélouve (La Réunion) | 28/02/1964 |
1 110 | 1 689 | Bélouve (La Réunion) | 28/02/1964 |
1 440 | 1 825 | Foc Foc (La Réunion) | 15/03/1952 |
Records pluviométriques mondiaux en 1979 pour des durées allant d’une minute à une journée,
extrait de Chocat et Eurydice, 1993. Pour mémoire, la hauteur moyenne annuelle de pluie sur le territoire métropolitain est de 800mm.
Lorsque l’on choisit les dimensions d’un ouvrage, par exemple le diamètre d’un tuyau destiné à évacuer les eaux de ruissellement urbaines, on accepte donc toujours un certain risque que cet ouvrage soit un jour insuffisant. Ce risque est évalué par sa « période de retour », c’est-à-dire l’intervalle de temps moyen qui sépare deux événements au moins aussi forts que celui pris en compte pour calculer les dimensions de l’ouvrage. Pour les canalisations d’évacuation des eaux pluviales urbaines, cette période de retour est souvent choisie entre 5 et 50 ans, la valeur 10 ans ayant pendant très longtemps constituée la référence [1]
Le risque de débordement, et par conséquent d’inondation urbaine, est donc implicitement accepté dans le principe même de la gestion des eaux pluviales par le système du « tout à l’égout ».
Un évènement qui se produit en moyenne une fois tous les dix ans peut paraître rare. Mais au-delà de sa fréquence, il est important de regarder la gravité de ses conséquences. Le risque est très différent selon qu’il ne concerne que l’inondation de quelques caves ou la noyade de plusieurs personnes. La gravité des conséquences est directement liée à l’importance possible des flux d’eau qui débordent, laquelle est souvent proportionnelle au débit qui peut transiter dans les conduites.
Les centres historiques des villes, là où ont été construits les premiers réseaux, sont généralement situés près des points bas (près du port ou du pont, au bord de la rivière) et l’extension urbaine s’est développée en couches successives, s’éloignant progressivement de ce centre historique, en occupant des zones de plus en plus élevées et éloignées de la rivière. Comme l’eau s’écoule toujours du haut vers le bas, deux solutions étaient possibles : soit construire de nouveaux collecteurs de grande dimension, contournant le centre pour aller jusqu’à la rivière, soit raccorder les nouveaux réseaux sur ceux déjà existant. Un bon principe d’ingénierie étant l’économie de moyens, la deuxième solution a souvent été privilégiée. Le résultat est la concentration des flux vers les réseaux les plus anciens du centre-ville.
Cette situation a trois conséquences :
En conclusion, on peut donc affirmer que non seulement l’utilisation d’un réseau d’assainissement pour la collecte et l’évacuation des eaux pluviales ne protège pas contre le risque d’inondation, mais qu’au contraire cette solution amplifie beaucoup ce risque.
Dans les pays développés, et en particulier en France, tous les réseaux d’assainissement conduisent l’eau à une station d’épuration. Pendant les périodes de temps sec, on peut donc considérer que, globalement, les systèmes d’assainissement jouent un rôle positif vis-à-vis de la pollution rejetée aux milieux naturels [2]
En revanche les systèmes d’assainissement sont peu efficaces pour gérer les rejets urbains de temps de pluie. Rappelons que quatre types de rejets doivent être considérés :
En conclusion, le fait de recueillir les eaux de pluie dans un réseau d’assainissement, qu’il soit unitaire ou séparatif, conduit le plus souvent à rejeter de grandes quantités de polluants pendant les périodes d’orage. Il ne s’agit donc pas d’une solution efficace pour limiter la pollution déversée.
L’eau douce est considérée de façon unanime comme une ressource rare qui doit être protégée. L’eau de pluie constitue le point de départ du cycle hydrologique. C’est elle qui reconstitue en permanence nos ressources en eau douce. Plus ces ressources sont proches des villes, plus elles sont précieuses. On devrait donc considérer que l’eau de pluie qui tombe sur les villes est l’une des ressources les plus précieuses que nous offre la nature.
Au lieu de cela, on lui attribue la seule et unique tâche de laver les caniveaux et les égouts. De ressource, on la transforme en déchet, ce qui justifie qu’on la mélange souvent aux eaux usées.
Comme si ce n’était pas encore suffisant, on la concentre dans des tuyaux de plus en plus gros et de déchet on la transforme à nouveau, cette fois, en menace chargée d’aller inonder le centre de nos villes.
Pour réussir cet exploit remarquable, on utilise un système d’infrastructure gigantesque dont le coût d’amortissement est du même ordre de grandeur que celui de l’ensemble des bâtiments publics.
Cette solution n’est donc pas durable.
[1] Dire que la période de retour est de 10 ans signifie que, en théorie, la probabilité d’avoir au cours de l’année un pluie plus intense que celle prise en compte pour le dimensionnement est de 1 sur 10.
[2] En réalité les stations d’épuration ne « nettoient » pas complètement l’eau. Elles dégradent une partie de la matière organique mais les autres polluants sont seulement en partie séparés de l’eau qui les contient. Ceci signifie d’une part que certains polluants ne sont pas nécessairement arrêtés par la station (voir les textes sur les médicaments ou sur les pesticides), et d’autre part que les déchets contenant les polluants (les boues), doivent aussi être correctement gérés pour éviter le transfert des polluants vers le milieu naturel.
Les problèmes posés par la gestion actuelle des eaux pluviales sont tous liés au fait que l’on souhaite les évacuer le plus rapidement possible de la ville. Une gestion alternative consiste au contraire à les conserver et à les gérer le plus près possible de l’endroit où elles tombent.
Deux stratégies sont possibles :
Depuis que dans les années 1980 les chercheurs ont commencé à étudier la qualité des rejets urbains de temps de pluie, l’idée selon laquelle les eaux pluviales urbaines sont polluées s’est peu à peu imposée. Beaucoup pensent donc qu’il est dangereux d’infiltrer ces eaux pluviales polluées dans le sol des villes.
Les eaux pluviales urbaines sont-elles polluées ?
En réalité, la pollution des eaux pluviales urbaines est un concept beaucoup plus compliqué qu’il n’y paraît. On se doit de distinguer quatre étapes dans l’évolution de la pollution des eaux pluviales urbaines :
L’eau de pluie est polluée. En effet l’atmosphère contient diverses molécules, fixées ou non sur des poussières ou des particules, et qui vont être dissoutes ou entraînées par les précipitations. Les concentrations sont cependant faibles et elles n’ont aucune raison d’être plus fortes pour les gouttes d’eau qui tombent sur une surface imperméable que pour celles qui tombent sur une surface perméables et qui s’infiltrent sans que personne n’y trouve à redire…
Lorsqu’elle arrive au sol, l’eau de pluie commence une triple action d’érosion, de dissolution et de transport des éléments chimiques qu’elle rencontre. Plus elle circule en surface et plus elle se charge en produits divers du fait de l’érosion des matériaux et du lessivage des matières qui se sont déposées pendant les périodes sèches. Devenue eau de ruissellement, sa concentration en polluant augmente.
Elle augmente encore plus vite lorsque l’eau arrive dans les caniveaux, puis dans le réseau d’assainissement où elle devient effluent pluvial strict. En effet, ces ouvrages servent, en période sèche, de réceptacle à toutes sortes de déchets et d’immondices car ils sont trop souvent considérés comme des poubelles, aussi bien par les citadins que lors du nettoyage des rues.
Enfin, si le réseau est de type unitaire, l’eau de pluie se mélange aux eaux usées et nettoie les collecteurs des vases et dépôts divers qui s’y sont accumulés. Les concentrations en polluants dans les effluents unitaires s’accroissent encore.
Le tableau à droite montre la variation des concentrations selon le type d’eau considérée.
Le risque pris en infiltrant les eaux pluviales dépend donc beaucoup du type d’eau que l’on souhaite infiltrer et donc de sa concentration en polluants.
Ce n’est cependant pas le seul élément à prendre en compte, car même si l’eau contient des polluants, le sol possède une certaine capacité d’épuration.
Quelle est la capacité du sol à fixer les polluants ?
Le sol a une capacité de dépollution importante. Les premières installations d’épuration reposaient d’ailleurs entièrement sur cette capacité, les eaux usées étant simplement « épandues ». Ce procédé est toujours celui utilisé pour la plupart des installations d’assainissement individuelles. L’usine d’épuration « sol » fonctionne selon un procédé assez simple : le matériau sert de support à une communauté de bactéries, de champignons et d’algues qui oxydent la matière organique et la transforment en matière minérale inerte.
Ce mode de dégradation ne concerne cependant que les matières organiques (déjections animales, hydrocarbures, …) dont la concentration est de toute façon assez faible dans les eaux pluviales.
Pour les autres polluants organiques ou minéraux, la capacité d’épuration du sol dépend essentiellement de leur solubilité. Si les polluants sont peu solubles, ils vont s’adsorber rapidement sur les particules du sol et se fixer sur les premiers centimètres. C’est en particulier le cas pour polluants métalliques (plomb, zinc, cadmium, cuivre, …). En revanche, les polluants solubles (par exemple les nitrates) vont percoler dans le sol et rejoindre la nappe phréatique.
Les polluants que l’on trouve dans les eaux de ruissellement urbaines sont par chance très souvent particulaires et sont donc assez bien arrêtés par le sol. Trois points importants doivent cependant être mis en avant :
A quelles conditions peut-on infiltrer des eaux pluviales urbaines ?
L’infiltration des eaux pluviales urbaines présente très peu de risques de pollution pour l’environnement si l’on respecte trois conditions :
Est-ce toujours possible d’infiltrer des eaux pluviales urbaines ?
Une autre crainte est que la capacité d’infiltration du sol soit insuffisante pendant les pluies intenses et que cette solution provoque des inondations.
En réalité, l’infiltration des eaux pluviales urbaines est presque toujours possible d’un point de vue hydraulique, même avec des sols relativement peu perméables. Il s’agit d’une question de dimensionnement, de stockage temporaire ou de délocalisation (transit pour une infiltration en un lieu plus favorable).
Les risques de colmatage existent mais les solutions sont maintenant connues pour y faire face.
Est-ce intéressant de stocker et de réutiliser les eaux pluviales urbaines ?
Infiltrer l’eau permet d’humidifier les sols urbains et de réalimenter les nappes phréatiques. L’eau ainsi gérée est donc conservé pour une utilisation ultérieure. Elle est cependant difficile à mobiliser localement par la suite.
Une autre possibilité consiste à stocker l’eau dans un réservoir pour l’avoir facilement à disposition. Ce réservoir peut-être privatif, par exemple une citerne récupérant les eaux de la toiture, ou collectif, par exemple bassin de stockage constituant une réserve pour des usages municipaux (lavage des rues, arrosage des espaces verts, …).
Il est également possible d’utiliser des solutions décentralisées beaucoup plus innovantes susceptibles d’améliorer la qualité de la vie en ville :
L’intérêt peut être individuel (économies d’eau) ou collectif (diminution des ilots de chaleur urbains), amélioration de la qualité de la végétation, etc.
L’eau de pluie urbaine doit donc être considérée comme une ressource précieuse et non comme un déchet.
Partout dans le monde, depuis une quarantaine d’années, de nouvelles solutions, dites alternatives, se développent, visant à limiter au maximum l’utilisation des réseaux pour gérer les eaux pluviales. Elles peuvent prendre de nombreuses formes : noues, fossés, tranchées, puits d’infiltration, bassin, toitures stockantes, etc. On trouve une multitude de guides techniques qui expliquent comment mettre en œuvre ces techniques alternatives (voir par exemple les sites du GRAIE, de l’ADOPTA, du CEREMA ou le portail sur l’assainissement communal du ministère en charge de l’écologie). Ces solutions feront l’objet d’une question spécifique de Méli Mélo et ne seront donc pas présentées en détail ici.
Les solutions proposées sont extrêmement diversifiées et peuvent s’adapter à tous les climats, tous les types de sol et toutes les formes urbaines (centre-ville dense, zone pavillonnaire, zone d’activités, etc.). Les retours d’expériences sont maintenant nombreux et de plus en plus de bureaux d’études et d’entreprises ont le savoir-faire pour concevoir, fabriquer et exploiter ces solutions nouvelles. Les matériaux et équipements disponibles sont de plus en plus performants. Enfin, la doctrine de l’Etat vise clairement au développement de ces solutions qui sont fortement encouragées par les Agences de l’eau.
Malgré les difficultés et les freins nombreux qui subsistent (peur de la nouveauté, modification nécessaire des méthodes de travail, difficultés de gestion du fait de la diversité des ouvrages et de leur taille restreinte, intérêts économiques divergents, etc.), le développement de ces nouvelles solutions est indispensable et il est aujourd’hui engagé.
Leur mise en œuvre est d’ailleurs devenue la règle dans de nombreuses collectivités, petites ou grandes, qui ont été pionnières dans ce domaine : Communautés urbaines de Lyon ou de Bordeaux, Départements de Seine St Denis et du val de Marne, villes de Douai ou de Montbéliard, pour ne citer que quelques exemples.
L’objectif recherché devrait être de rendre la ville « transparente pour l’eau », c’est-à-dire de faire en sorte que le processus d’urbanisation perturbe le moins possible, et idéalement pas du tout, le cycle hydrologique « naturel » [1].
Sur un plan plus pratique, ce grand principe se décline de la manière suivante :
Enfin les ouvrages eux-mêmes devront être traités en continuité avec les milieux naturels, de façon à préserver et à développer les corridors aquatiques et s’inscrire dans les trames vertes et bleues.
En pratique les tuyaux ne devraient plus être qu’une exception pour gérer les eaux pluviales.
Il faudra bien sûr du temps et beaucoup d’efforts pour faire évoluer un système qui a mis plusieurs siècles à se constituer. Au-delà de cet impératif de patience, il paraît raisonnable de s’appuyer sur trois lignes directrices principales :
En conclusion, comme le dit Martin Guespereau [2] : « Le tout tuyau, c’est fini ! »
[1] Il est à noter que cet objectif de « ne pas modifier » revient à considérer la situation avant aménagement comme la référence à respecter. En réalité, rien ne prouve que la situation avant aménagement soit naturelle (le comportement d’un sol agricole est différent de celui d’un sol naturel), et encore moins que cette situation ne soit « idéale ».
[2] Directeur général de l’Agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, en ouverture de la conférence internationale Novatech 2013, sur les stratégies et solutions pour une gestion durable de l’eau dans la ville.