En France on utilise plusieurs types de ressources pour produire de l’eau potable. Pour environ les 2/3 des consommateurs ces ressources sont constituées par des eaux souterraines (captage direct dans une nappe ou exploitation d’une source). L’utilisation de ces ressources pour produire de l’eau destinée à la consommation humaine nécessite que leur qualité soit préservée. Si leur qualité est insuffisante le coût des traitements peut devenir très élevé. Dans certains cas, si la pollution est trop importante, la réglementation interdit même de les utiliser comme eau brute.
Or la plupart des milieux aquatiques, même souterrains, sont touchés par des pollutions, en particulier dues à des excès en matières nutritives (azote essentiellement) ou en pesticides. Une grande partie de ces polluants sont d’origine agricole.
Historiquement, les textes réglementaires (et en particulier le code de la santé publique) qui permettent de protéger les ressources en eau par des périmètres de sécurité étaient surtout destinés à prévenir les pollutions ponctuelles ou accidentelles, en particulier bactériologiques. Depuis une vingtaine d’années, des efforts très importants sont faits pour prendre également en compte les pollutions diffuses. Ceci nécessite de travailler sur la totalité de l’aire d’alimentation des captages (AAC), c’est-à-dire la totalité de la surface qui alimente la ressource.
Les périmètres réglementaires peuvent être utilisés pour ce faire. D’autres outils réglementaires, par exemple les zones soumises à contraintes environnementales (ZSCE), ont été créés pour faciliter la mise en place de plans d’action cohérents et efficaces. Ces plans visent en particulier à protéger plus de 1 000 captages prioritaires [1] dont la liste devra être arrêtée dans le cadre de l’élaboration des SDAGE [2] pour la période 2016-2021.
Les plans d’action mettent en œuvre des actions visant les activités agricoles (limitation de l’utilisation des engrais ou des pesticides, contrôle des ruissellements, etc..), mais également les autres activités susceptibles de polluer les ressources, qu’elles soient urbaines ou industrielles.
L’efficacité de ces plans d’action dépend de la qualité du diagnostic sur l’origine des contaminants, mais également de la capacité à mobiliser positivement l’ensemble des acteurs. De plus, même si l’objectif de protection de la ressource est essentiel, le plan d’action doit être pensé dans une logique plus globale de gestion des milieux aquatiques (respect du fonctionnement des hydro-systèmes, gestion des risques d’inondation, etc.).
[1] C’est l’un des objectifs affirmés de la conférence environnementale de septembre 2013. Voir :
http://www.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Feuille_de_route_2013_VDEF.pdf
[2] Les Schémas Directeurs d’Aménagement et de Gestion des Eaux (SDAGE) sont établis pour 5 ans pour chacun des grands bassins hydrographiques, suite à une consultation du public (actuellement en cours jusqu’en juin 2015). Institués par la loi sur l’eau de 1992, les SDAGE fixent les orientations fondamentales d’une gestion équilibrée de la ressource en eau dans l’intérêt général et dans le respect des principes de la directive cadre sur l’eau et de la loi sur l’eau.
Avant d’arriver au robinet, l’eau doit être captée puis, en général, traitée pour la rendre apte à la consommation humaine. L’eau brute est l’eau qui est captée dans la ressource.
Les ressources potentiellement utilisables pour le captage sont diverses et dépendent du contexte hydrogéologique du lieu. On distingue :
Techniquement la réponse est oui. Il est possible de filtrer l’eau de telle façon qu’il ne reste plus que des molécules H2O à l’issue du processus. Dans ce cas l’eau doit d’ailleurs être ensuite reminéralisée pour ne pas poser de problèmes sanitaires.
Cependant, en France, la réglementation interdit de fabriquer de l’eau destinée à la consommation humaine (EDCH) avec des eaux brutes qui sont trop polluées. L’arrêté du 11 janvier 2007 qui fixe la qualité des EDCH, fixe également les limites et références que doit vérifier l’eau brute pour être utilisable pour la production d’EDCH.
Ces normes sont moins sévères que celles prises en compte pour les EDCH elles-mêmes. Elles peuvent être différentes pour les eaux superficielles et pour les eaux souterraines. Pour les eaux superficielles, elles dépendent également du type de traitement auquel elles doivent être soumises pour être rendues aptes à la consommation humaine.
Par exemple le seuil est de 0,5 µg/L pour la somme des concentrations de l’ensemble des pesticides quantifiées pour les EDCH, alors qu’il est fixé à 5 µg/L pour que l’eau soit utilisable pour la production d’EDCH. Ceci s’explique par le fait que les traitements utilisés dans l’usine de production d‘eau potable réduisent ces concentrations.
En France, on trouve des traces de polluants dans tous les milieux aquatiques. Les concentrations sont parfois trop fortes pour que la ressource puisse être utilisée pour la production d’EDCH. Les substances les plus souvent déclassantes [1] sont les nitrates (même si la situation s’améliore sensiblement sur ce volet) et les pesticides.
Les rivières sont plus touchées que les plans d’eau et les eaux souterraines en nombre de détections et surtout en concentration moyenne. Cependant, comme les eaux souterraines constituent la ressource prioritaire en eau potable, les normes sont en général plus contraignantes. Pour cette raison le nombre de dépassement de la norme réglementaire est plus important pour les eaux souterraines (27 %) que pour les cours d’eau (11%).
Même si beaucoup des substances que l’on retrouve dans les eaux brutes ont fait l’objet d’interdiction ou de limitation d’usages au cours des dernières années, la situation reste préoccupante, en particulier dans un contexte de changement climatique qui risque d’augmenter la pression sur les ressources. En dehors du cas extrême où le captage doit être abandonné [2], une qualité insuffisante de l’eau brute nécessite en effet un traitement poussé pour que l’eau soit utilisable comme EDCH, ce qui augmente les coûts.
L’alimentation en eau potable des citoyens est un enjeu évident de santé publique pour les générations actuelles et futures. La qualité des eaux distribuées doit donc impérativement être préservée.
Pour atteindre cet objectif deux solutions sont envisageables :
La première solution, outre le fait qu’elle soit extrêmement coûteuse, ne protège pas les milieux aquatiques qui ont d’autres fonctions que de servir de ressources en eau potable. Elle ne peut en aucun cas représenter une solution durable. Réaliser des actions préventives par la mise en place de meilleures pratiques agricoles et non agricoles en amont des zones de captage est donc la seule solution fiable sur le long terme.
[1] Le paramètre déclassant est celui qui est le plus pénalisant pour la qualité du milieu aquatique ; en pratique, c’est celui qui conditionne l’attribution d’une classe de qualité au milieu.
[2] En France, la principale cause d’abandon de captage est liée à la qualité de la ressource en eau avec 1 958 captages concernés (soit 41 % des captages abandonnés). Parmi les paramètres qualitatifs, les pollutions diffuses liées aux nitrates et/ou pesticides sont à l’origine du plus grand nombre d’abandons avec 878 captages concernés (soit 19 % des abandons). (Source : Ministères en charge de l’Agriculture et de l’écologie, 2013)
Nous présenterons ici essentiellement les solutions visant à protéger les ressources souterraines. Ce parti-pris repose sur trois arguments :
Toute ressource souterraine est alimentée par un territoire que l’on appelle l’aire d’alimentation du captage (AAC) ou Bassin d’alimentation de captage (BAC). Par définition, il s’agit de la surface sur laquelle toute goutte d’eau qui rejoint le sol est susceptible d’arriver jusqu’au captage. Les écoulements peuvent se faire en surface par ruissellement ou de façon souterraine à travers le sol ou au sein de la nappe alimentant le captage. Il peut également exister des échanges entre cette nappe souterraine et eaux de surface sur le même territoire. Par extension, toute substance contenue dans le sol ou en surface de la zone d’alimentation du captage est également susceptible de rejoindre le point de captage.
C’est donc l’échelle des AAC qui est la mieux appropriée pour mettre en place un plan d’action visant à protéger le captage.
L’analyse du risque de pollution des réserves souterraines nécessite de prendre en compte deux aspects différents :
En France, les eaux souterraines sont soumises à un grand nombre de pressions du fait de l’anthropisation des sols et de l’utilisation massive de produits naturels ou artificiels. De très nombreux polluants sont susceptibles de les contaminer. Ces polluants peuvent être classés en fonction de leur nature physico-chimique :
Ils peuvent également être classés en fonction de leurs conséquences possibles sur les écosystèmes (eutrophisation, écotoxicité, …) ou sur la santé humaine (substances cancérigènes, mutagènes, allergogènes, etc.) ; en fonction de leur origine (agriculture, industrie, voies de circulation, villes, …) ou en fonction de leur mode d’introduction dans le système aquatique (en particulier sous la forme de sources ponctuelles bien identifiées ou de sources diffuses).
En France, dans la plupart des situations, les deux familles de polluants qui exercent le plus de pression sur les eaux souterraines sont les produits fertilisants (en particulier l’azote) et les pesticides.
La protection principale dont bénéficient les ressources souterraines est constituée par la couche de sol [1] dite non saturée, c’est-à-dire contenant de l’air, qui est située entre la surface et la nappe souterraine. Les polluants doivent en effet traverser cette couche de sol pour atteindre la ressource. La vulnérabilité de la ressource dépend donc, entre autres, des caractéristiques de cette couche de sol : épaisseur, capacité d’infiltration, couverture végétale, composition, etc…
Cette vulnérabilité n’est pas la même partout sur tout le territoire de l’AAC et la vulnérabilité globale de la ressource est souvent directement liée à celle de la partie de territoire la plus vulnérable. En d’autres termes, les polluants vont généralement contaminer la ressource en utilisant le chemin le plus direct : là où l’épaisseur de la zone non saturée est la plus faible, la perméabilité la plus grande et la capacité à piéger les polluants la plus réduite.
La vulnérabilité de la ressource est également d’autant plus grande que les points d’introduction des polluants sont proches des points de pompage.
En 2009, suite au Grenelle de l’Environnement, les ministères en charge du Développement durable, de la Santé et de l’Agriculture ont publié une liste de 500 captages, dits « captages Grenelle » à traiter de façon prioritaire.
La liste a depuis lors évolué. Elle a dans un premier temps été étendue à 530 ouvrages constitués de plus de 890 points de prélèvement. Répartis sur toute la France, ces captages prioritaires ont été identifiés suivant un processus de concertation locale, sur la base de trois critères : l’état de la ressource vis-à-vis des pollutions par les nitrates ou les pesticides ; le caractère stratégique de la ressource au vu de la population desservie, enfin la volonté de reconquérir certains captages abandonnés.
La conférence environnementale de septembre 2013 a réaffirmé cet objectif et une liste de plus de 1 000 captages prioritaires sera définie dans les futurs SDAGE (Schémas Directeurs d’Aménagement et de Gestion des Eaux) [2] qui vont couvrir la période 2016-2021.
Une cartographie interactive permettant de visualiser ces captages est disponible sur le site Cartelie du Ministère.
[1] Par « sol », nous entendons ici l’ensemble des couches constituant la surface de la terre, c’est-à-dire le sol au sens des pédologues, mais aussi éventuellement les premières couches de roches sous-jacentes.
[2] Une consultation publique est en cours et permet à chacun de s’exprimer sur les sites de chacune des Agences de l’eau.
La protection des ressources souterraines consiste à agir de façon cohérente et coordonnée d’une part sur les pressions en diminuant les quantités de polluants susceptibles de contaminer l’AAC, et d’autre part sur la vulnérabilité. Comme indiqué précédemment, comme tout polluant présent dans l’AAC est susceptible de contaminer le captage, c’est à cette échelle que doivent être réfléchies les mesures de protection.p>
L’article L 1321-2 du code la santé publique est ainsi rédigé :
« En vue d’assurer la protection de la qualité des eaux, l’acte portant déclaration d’utilité publique des travaux de prélèvement d’eau destinée à l’alimentation des collectivités humaines mentionné à l’article L. 215-13 du code de l’environnement détermine autour du point de prélèvement un périmètre de protection immédiate dont les terrains sont à acquérir en pleine propriété, un périmètre de protection rapprochée à l’intérieur duquel peuvent être interdits ou réglementés toutes sortes d’installations, travaux, activités, dépôts, ouvrages, aménagement ou occupation des sols de nature à nuire directement ou indirectement à la qualité des eaux et, le cas échéant, un périmètre de protection éloignée à l’intérieur duquel peuvent être réglementés les installations, travaux, activités, dépôts, ouvrages, aménagement ou occupation des sols et dépôts ci-dessus mentionnés. »
Il existe donc trois périmètres réglementaires de protection de captage qui sont définis par arrêté préfectoral au moment de la déclaration d’utilité publique (DUP) [1] :
Les arrêtés préfectoraux définissent également les installations et les activités qui sont réglementées ou interdites à l’intérieur de ces périmètres. Ces interdictions ou réglementations peuvent donner lieu au paiement d’indemnités aux propriétaires fonciers, soit suite à leur expropriation (dans le PPI), soit pour perte de valeur foncière, du fait des servitudes. Les exploitants intervenant dans le périmètre de protection rapprochée peuvent également être indemnisés pour baisse de marge brute ou surplus d’investissements.
Historiquement, cette réglementation a concerné prioritairement des pollutions ponctuelles, d’origine chronique ou accidentelle.
Le dispositif des zones soumises à contraintes environnementales (ZSCE) est issu de l’article 21 de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006. Au-delà des aires d’alimentation de captage, il s’applique également aux zones humides, zones érosives ou baies à algues vertes identifiées dans les SDAGE. Dans le cadre d’une politique globale de reconquête de la qualité de la ressource, cet outil vient en complément du dispositif des périmètres de protection, afin de lutter contre les pollutions diffuses.
La désignation en ZSCE permet la mise en œuvre d’une action spécifique de nature réglementaire, concernant notamment l’activité agricole ou l’espace dans lequel elle s’inscrit.
Pour les captages prioritaires, il est préconisé d’agir sur un territoire plus étendu : La zone de protection de l’AAC (ZP AAC). Cette zone regroupe les secteurs de l’AAC les plus vulnérables vis-à-vis des pollutions diffuses. Elle correspond à une échelle d’intervention réaliste pour améliorer la qualité de l’eau du captage vis-à-vis des pollutions diffuses, face à des enjeux environnementaux identifiés. Sa délimitation s’appuie principalement sur les ZSCE. Certains captages prioritaires méritent une attention particulière, du fait d’une population importante sur l’AAC ou du caractère stratégique de la ressource.
Le fait qu’il paraisse préférable de mettre en œuvre les plans d’action à l’échelle des aires d’alimentation de captages ne doit pas être opposé à la mise en place des périmètres de protection. Les périmètres réglementaires visent essentiellement la protection contre les pollutions ponctuelles ou accidentelles, alors que les plans d’action à l’échelle des AAC et la mise en place des ZSCE s’intéressent à la protection contre les pollutions diffuses. Les deux approches doivent donc être considérées comme complémentaires.
Les périmètres réglementaires peuvent d’ailleurs constituer un premier outil pour lutter contre les pollutions diffuses :
La figure suivante (source : Agence de l’Eau Rhône Méditerranée Corse) schématise ces différents périmètres.
En premier lieu, il est important de rappeler que si la protection des zones de captage est extrêmement importante en termes de santé publique, elle ne constitue cependant que l’un des volets de la politique de l’eau à mener sur les bassins versants. Les actions locales visant à protéger les ressources souterraines en eau devraient donc toujours être considérées comme partie prenante de l’ensemble des actions donc l’objectif est la préservation et la reconquête de la qualité des milieux aquatiques. Leur efficacité devrait être évaluée à la fois en termes de meilleure protection de la ressource et en termes d’amélioration de la qualité des hydrosystèmes.
Ces actions s’inscrivent d’ailleurs souvent dans le cadre de SAGE (Schémas d’Aménagement et de Gestion des Eaux).
En second lieu, il est également essentiel de rappeler que l’AAC est, dans la plupart des cas, un territoire anthropisé. Des hommes et des femmes y vivent, y travaillent, y développent des activités multiples. Tout plan d’action ne peut donc se faire qu’avec eux. Le diagnostic doit être partagé par l’ensemble des acteurs du territoire ; les objectifs à atteindre doivent être appropriés ; les mesures à prendre (qui peuvent être contraignantes) doivent être comprises et acceptées. Le plan d’action lui-même doit être considéré comme un véritable projet de territoire.
Enfin, on restreint souvent les plans d’action à la lutte contre les pollutions liées à l’utilisation des fertilisants et des pesticides en mettant plus ou moins directement en cause le monde agricole. Même s’il est vrai que ces polluants sont ceux le plus souvent à l’origine de la dégradation des ressources souterraines, il est essentiel d’intégrer également dans la réflexion les pollutions liées à la gestion des eaux usées et pluviales des collectivités ainsi que celle des industries.
La première étape de tout plan d’action consiste à bien identifier les problèmes principaux qui doivent être résolus : Quelles sont les contaminants principaux posant problème et dont les concentrations doivent être réduites ? Il est ensuite nécessaire de bien définir les cibles et les logiques d’action : Quelles sont les sources principales de contaminants ? Comment est-il possible de les contrôler ?
Une deuxième étape indispensable et à conduire en parallèle à la première, consiste à se fixer des objectifs raisonnables et partagés sur la qualité à atteindre pour l’eau. Pour ceci il est d’abord nécessaire de bien identifier l’ensemble des acteurs à mobiliser. Sans une vision partagée, il sera en effet très difficile de mettre en place des actions efficaces et s’inscrivant dans la durée.
Une fois ces préalables acquis, il devient possible d’établir une liste d’actions, de les hiérarchiser et de définir précisément le contenu technique de chacune d’entre elles. Les aspects financiers et de maîtrise du foncier associés à chaque action doivent être pris en compte dès le début du processus. Ceci inclut la mesure de l’impact des actions sur les activités économiques et en particulier sur les exploitations agricoles concernées.
Enfin il est indispensable de mettre en place les indicateurs précis permettant de juger de l’efficacité des mesures.
Les actions envisageables sont extrêmement variées, et il n’est pas possible d’en donner une liste exhaustive. Elles peuvent s’appuyer sur l’animation et le dialogue, sur la réglementation, sur la contractualisation, sur la construction d’aménagement, sur des acquisitions foncières, etc.. Elles nécessitent souvent la mobilisation d’acteurs complémentaires à ceux dont la gestion des milieux aquatiques est la mission principale : agriculteurs, gestionnaires des réseaux de transports, différents services des collectivités (voirie, espaces verts ou restaurants scolaires), particuliers (en tant que jardiniers amateurs ou consommateurs), etc. Le tableau suivant illustre les différents types d’action possibles.
Ces actions à l’échelle de l’aire d’alimentation des captages ne visent pas que l’agriculture et ne visent pas nécessairement à interdire l’agriculture. Elles consistent à améliorer l’usage du sol dans ce périmètre, en l’adaptant notamment aux enjeux de restauration de la qualité de la ressource.
La ville de Lons-le-Saunier capte son eau potable dans une plaine alluviale à une dizaine de kilomètres de la ville. Initialement une zone de prairies, forêts et zones humides, elle a subit des remembrements et était devenue un secteur de grandes cultures (notamment blé et maïs). En 1990, les analyses de l’eau font ressortir une pollution croissante en nitrates et pesticides. La ville s’engage alors dans un politique d’action globale et cohérente pour une eau de qualité, avec la volonté d’agir en amont de la ressource.
La première étape, dans les années 1990-1992 a été la mise en place de conventions avec les agriculteurs, avec l’interdiction de certaines pratiques culturales (comme l’épandage des lisiers, l’interdiction de la culture du maïs), la fertilisation raisonnée et le retour au fourrage dans les périmètres rapprochés. Ces mesures sont accompagnées de compensations apportées par la ville. Les analyses de l’eau ont rapidement mis en évidence une amélioration de la qualité de la ressource.
La seconde action a été de faire évoluer l’offre classique de la restauration collective. La démarche a été engagée avec une incitation forte au développement du blé bio sur le territoire et une traçabilité jusqu’au pain distribué par les restaurants municipaux et d’entreprises. Elle a été progressivement étendue aux laitages et aux produits maraîchers, aujourd’hui bio à 25% sur le territoire jurassien. Cette démarche a permis d’améliorer la qualité de la ressource, mais aussi de développer une agriculture biologique sur le territoire, favoriser les circuits courts et soutenir la vitalité et l’emploi sur le territoire.
La troisième étape a été la nécessaire mobilisation de tous, et en particulier la nécessité pour la ville d’être moteur et exemplaire, pour être crédible : la ville s’est engagée dans une démarche "zéro phyto" dans l’entretien de ses espaces publics, avec l’accueil d’emplois d’insertion. Elle a également initié des actions de sensibilisation à destination du grand public, pour faire tendre l’ensemble de la population vers la préservation des ressources locales.
La quatrième étape est la déclaration de ce captage en captage prioritaire Grenelle en 2009, ce qui a permis à la ville de Lons-le-Saunier de déclencher un plan d’action volontaire sur l’ensemble du bassin versant, et pas seulement sur les périmètres de la DUP (déclaration d’utilité publique), avec des mesures différenciées en fonction de la distance au captage : sur les 8 hectares du périmètre immédiat, les 60 ha du 1er périmètre rapproché, les 160 hectares du 2e périmètre rapproché, les 1500 hectares du périmètre éloigné et au-delà sur les 3 150 hectares de l’aire d’alimentation des captages.
Un point essentiel de cette action globale est l’importance d’avoir une évaluation permanente des résultats de la politique publique dans l’amélioration de la qualité de la ressource en eau. Cette évaluation permet aux collectivités de disposer d’arguments forts pour motiver les efforts nécessaires, de la part de tous, à la poursuite de l’action.
En conclusion : "L’environnement ne se partage pas ; la qualité de l’eau ne se partage pas ; il faut agir en tous domaines ; ils se complètent, ils s’étayent les uns les autres. Quand on a une bonne eau potable, on a moins de déchets dans nos poubelles, on a donc un coût moindre sur l’ensemble du registre de l’action municipale orientée vers la protection de notre environnement. C’est le message que j’ai voulu faire passer ; ayons ensemble une approche volontariste, ayons du courage politique, ayons ensemble la volonté de bien défendre notre environnement. Merci !"
Retranscription de l’intervention de Jacques Pélissard, Député-Maire de Lons-le-Saunier et Président d’honneur de l’Association des Maires de France au colloque de l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse du 29 novembre 2013 "L’eau – un projet de territoire". A voir sur la chaine YouTube de l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse
[1] Cet arrêté de DUP a été rendu obligatoire par le Plan National Santé Environnement pour l’ensemble des captages.
Sites web de référence utilisés pour le texte de synthèse :